Le train et les chemins du transfert

Par Jean-Jacques Barreau
Français

La psychanalyse fait ses premiers pas à travers les paysages d’un monde bouleversé par une invention technologique majeure, le chemin de fer, qui, avant d’être un événement historique, est un véritable traumatisme affectant les catégories de l’espace et du temps. Nouveau moyen de transport, le train se prête à tous les transports et Freud, grand voyageur souffrant d’une phobie du train, utilise à plusieurs reprises la métaphore ferroviaire pour parler du temps de la cure. Mais, c’est en 1913 que la métaphore ferroviaire, utilisée pour énoncer la règle fondamentale, déploie toute sa puissance d’évocation pour exposer le dispositif analytique. Avec le défilé du paysage où chaque plan découpé par la fenêtre en chasse un autre, la métaphore ferroviaire articule le temps, l’espace et la mémoire. Le paysage vu du train se donne et se retire, comme l’inscription sur le « bloc magique », selon le travail rythmique des investissements dans le système perception-conscience que Freud considère « à la base de l’apparition de la représentation du temps ». Le dispositif analytique, avec la règle fondamentale de la libre association, selon le modèle du paysage découpé par la fenêtre d’un compartiment de chemin de fer, convoque d’emblée la dynamique du transfert et de la résistance comme le chemin détourné (umwege) nécessaire à la levée du refoulement. La scène primitive de la psychanalyse se découpe dans l’encadrement de la fenêtre d’un compartiment de chemin de fer qui apparaît comme un point de fuite de ce qui se dévoile à l’intérieur du compartiment.

Mots-clés

  • Train
  • Temps
  • Transfert
  • Traumatisme
  • Deuil
  • Règle fondamentale
  • Dispositif analytique
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