La Shoah et le piège du mal

Par Jean-Jacques Moscovitz
Français

User du terme de Mal est un piège moderne qui ferait supposer répondre enfin au pourquoi de la Shoah. Le crime contre l’humanité est événement, et il ne le serait pas encore, car c’est une transmission brisée, brisée tant l’attaque de la mort a une magnitude sans précédent. Meurtre de la mort. L’attaque de la mort la change. Elle devient objet. Aujourd’hui nous voisinons avec une telle abjection un peu plus qu’avant, qu’on veuille le reconnaître ou non. La pratique du lien social, ou de celui du couple, montre cette difficulté. Cela fait retour dans les cures analytiques sous la forme de : comment ne pas abîmer plus son corps. C’est pourquoi l’analysant tient à se faire entendre pour se situer face au changement du rapport à la monstruosité, ayant pour conséquence une autre agressivité sociale, forme autre de canaillerie désormais s’ajoutant à celles d’avant. Comme si le complexe d’Œdipe, le meurtre pour le père, l’inceste pour la mère, étaient atteints. La magnitude des crimes dans la Shoah montre que la loi est devenue entièrement criminelle, au point de briser la transmission de la loi, et aboutir à une désupposition de la langue comme porteuse de valeurs : la mort, la vie, la jouissance, le lien social. Aujourd’hui tout se passe comme si un névrosé était dans la quasi impossibilité de ne pas devenir psychanalyste... Comment tenir quelque bout de réel de ce qui s’est passé dans l’histoire, sinon en essayant d’en entendre « quelque chose », du fait de devenir psychanalyste lui-même.

Mots-clés

  • Désupposition de la langue
  • Part injusticiable/hors-langage
  • Meurtre de la mort
  • Monstruosité
  • Loi entièrement criminelle
  • Devenir psychAnalyste...
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