Céline, l'analyste et « l'immonde interne »

Par Alain Ferrant
Français

L’œuvre de Céline est un analyseur de « l’immonde interne » pluriel, contrasté et diversifié. Freud lit Céline sur les conseils de Marie Bonaparte mais sans doute rebuté par les difficultés de la langue et les tournures spécifiques du style célinien Freud ne reconnaît pas « l’impatience amoureuse pour le néant » qui traverse Voyage au bout de la nuit. Inversement Céline a lu Freud. Dans sa correspondance privée, jusqu’à la fin de sa vie, il fait directement référence à Freud. Mais s’il reconnaît puiser quelque chose dans la psychanalyse, c’est d’abord comme romancier. Il retrouve une partie de son monde romanesque dans la psychanalyse d’après 1920. On ne peut pas « suivre » Céline comme on « suit » Freud mais on ne peut pas, non plus, ne pas l’entendre. Il est nécessaire d’ouvrir la boîte de pandore célinienne avec les outils de l’analyse. En ce sens la psychanalyse poursuit son travail de mise en évidence de processus psychiques à peu près inaccessibles autrement. Chez Céline l’affect occupe une place centrale et c’est précisément cette place qu’il est nécessaire d’interroger. C’est son caractère débordant et son omniprésence qui font symptômes. L’hypothèse de l’auteur est que Céline s’exprime au lieu même d’une « mésorganisation » de l’affect et contraint le lecteur à explorer cette zone. Céline pose problème parce qu’il active chez le lecteur la nécessité de sortir de la confusion des « émotions crues ». Son racisme radical est la caricature de ce que tout être humain doit réaliser : séparer le moi du non moi, construire l’inconscient comme réserve de l’intolérable, émerger de la douleur de la confusion par la différenciation.

Mots-clés

  • Immonde interne
  • Clivage
  • Affect
  • Contamination
  • Céline

Key-words

  • World of Internal Filth
  • Splitting
  • Affect
  • Contamination
  • Céline
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